Top Egde : Chapitre 30 - 888714

 

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Peu de temps après que Shen Siwei eut raccroché, une silhouette familière apparut au coin du balcon.

Klet descendit de la balustrade et entra dans la pièce, demandant d'un ton calme :

— C'est quoi cette histoire d'attaque ?

Ses yeux paraissaient creux, comme vidés de l'intérieur, ne laissant qu'une enveloppe sans âme. Shen Siwei ne savait comment décrire cette impression, mais il avait la certitude que le Klet qui se tenait là n'était plus tout à fait le même que celui qu'il avait quitté.

— Le raid industriel a échoué, dit Shen Siwei. L'armée a donc décidé de bombarder la ville.

Sans montrer la moindre réaction, Klet alla s'asseoir sur le canapé et relança l'épisode de Bob l'éponge resté en pause.

Shen Siwei : ... ?

Ce n'était vraiment le moment de regarder Bob l'éponge !

Il s'avança et se plaça devant l'écran, fronçant les sourcils :

— Cet endroit sera bombardé dans une heure. Tu es sûr que tu veux continuer à regarder des dessins animés ?

Klet leva vers lui un regard indifférent.

— Tu bloques l'écran.

Ce n'est qu'à cet instant que Shen Siwei comprit que quelque chose n'allait pas chez lui.

— Klet, jugea-t-il nécessaire de préciser, l'embuscade contre toi et les Rossignols venait de mon supérieur. Je n'ai jamais dit à qui que ce soit que vous alliez vous rencontrer.

Klet battit légèrement des paupières et, pour la première fois, fixa Shen Siwei.

— Et pourquoi ne pas l'avoir signalé ?
— Parce que...

Les mots restèrent coincés dans sa gorge.

Il comprenait la suspicion de Klet. Ils étaient dans des camps opposés ; il n'y avait aucune logique à cacher une information aussi cruciale.
Mais Shen Siwei n'avait pas pu le trahir.

Peut-être qu'à partir du moment où il s'était endormi à ses côtés, quelque chose en lui s'était fissuré.

— Parce que ? répéta Klet, un rictus au coin des lèvres. Tu cherches encore à me tromper.
— Je ne cherche vraiment pas à te tromper cette fois.

Shen Siwei ne supportait pas de le voir dans un tel état d'abattement. Il posa une main sur le dossier du canapé et agrippa son col de l'autre.

— Il faut qu'on évacue les civils immédiatement.
— Ah oui ? répliqua Klet en retirant sa main sans montrer la moindre émotion, les yeux toujours fixés sur l'écran. Alors tu n'as qu'à demander à ton supérieur d'annuler l'attaque.

Klet ne croyait toujours pas Shen Siwei, et n'avait même pas l'énergie de chercher à comprendre ce qu'il manigançait.

En temps normal, ne pas être cru n'aurait pas dérangé le soldat, il avait bel et bien menti.

Mais là, c'était une question d'urgence.

Il le gifla, l'obligeant à tourner la tête vers lui.

— Si je voulais te tromper, je ne t'aurais pas aidé à repousser les loups du désert, dit-il d'une voix sourde.

Un argument imparable.

À l'instant où il était intervenu, il s'était lui-même exposé. S'il avait encore eu l'intention de piéger Klet, pourquoi aurait-il fait ça ?

Les yeux du jeune homme vacillèrent, trahissant un début de conviction.

— Mon supérieur est déjà mécontent de mon travail, reprit Shen Siwei en se redressant et en éteignant la télévision d'un geste. Es-tu prêt à t'allier à moi maintenant ?

Le regard de Klet sembla peu à peu retrouver sa profondeur habituelle, comme si son esprit, hors service un moment, venait enfin de se remettre en marche.

— Je ne te mentirai plus.
— Tu m'as menti d'innombrables fois.

Malgré ses mots, Klet ouvrit le communicateur.

Moins de cinq minutes plus tard, un avis d'évacuation d'urgence apparut sur le mini-ordinateur de Shen Siwei.
Sur l'écran, le visage de Malken était maculé d'huile, preuve qu'il travaillait encore à réparer le système de défense du mur extérieur.

— Chers habitants, tout d'abord, j'ai une bonne nouvelle, la meute de loups du désert a été repoussée, vous n'avez donc pas à craindre de finir en repas pour les monstres. Mais l'armée va nous bombarder dans cinquante minutes. Veuillez préparer vos affaires et évacuer de manière ordonnée.

Dès que l'avis d'évacuation retentit, l'extérieur des fenêtres s'anima immédiatement.

Shen Siwei se dirigea vers le balcon et observa la scène. Beaucoup de civils se précipitaient déjà vers la ville voisine, traînant leurs valises.
La plupart avaient déjà fui lors de l'assaut des réfugiés sur l'Arbre de Vie, il n'y avait donc pas énormément de personnes à évacuer et les rues étaient relativement calmes.

Quarante à cinquante minutes suffiraient pour éloigner tout le monde, Shen Siwei put donc souffler un peu.

Il se tourna vers Klet, qui venait de raccrocher le communicateur, et demanda :

— Les réfugiés retourneront-ils à l'Arbre de Vie ?
— Les systèmes de défense des autres villes n'ayant pas été percés, ils ne pourront y entrer qu'en falsifiant leurs identités, répondit Klet. Knock et Avis seront emmenés par les Rossignols, les autres devraient retourner dans la Ville Souterraine du Désert. Viens voir.

Sur ces mots, il sauta sur le toit du bâtiment adjacent, puis se retourna, invitant Shen Siwei, à le suivre.

Ce dernier sauta également, et ils franchirent les toits l'un après l'autre, atteignant rapidement la limite de la ville.
À ce moment-là, de nombreux civils avaient déjà franchi les barrages et atteint la zone industrielle.

Klet s'arrêta sur le toit du bâtiment le plus proche du barrage et s'accroupit dans un coin, observant de loin la direction de la foule. Shen Siwei se baissa à côté de lui et suivit son regard, apercevant le coucher de soleil.

La lumière orangée baignait les deux silhouettes, projetant de longues ombres sur le toit. Une brise légère soufflait dans l'air, rendant le monde paisible et beau.

Mais ce n'était qu'un calme momentané avant le bombardement.

Shen Siwei changea de position, s'asseyant sur le rebord du toit, les mains derrière lui pour se soutenir, les jambes pendant dans le vide et se balançant doucement, ses talons heurtant parfois le mur.

Il tourna la tête et observa le profil de Klet.

— Tu n'étais pas toi-même cet après-midi.

L'autre détourna le regard vers lui, puis le fixa.

— Tu veux dire après avoir réalisé que j'avais été trompé pendant si longtemps ?
— J'étais en mission, fit Shen Siwei en haussant les épaules. Je ne voulais pas non plus faire semblant d'être faible.

Pour une raison inconnue, Klet esquissa un léger sourire, prit une profonde inspiration et dit :

— Ce n'est pas grave.

Ils continuèrent à regarder silencieusement le coucher de soleil. À ce moment-là, la majorité des civils avaient déjà été évacués vers la zone industrielle.

— Et ta mission, elle va devenir quoi ? demanda soudain Klet.

Shen Siwei laissa échapper un souffle et répondit calmement :

— Peu importe.

Puis il tourna la tête pour croiser le regard du jeune leader. Le temps sembla ralentir, aucun ne détournant les yeux.

Laissant de côté les tromperies, peut-être serait-il agréable pour eux de se redécouvrir, pensa Shen Siwei.

Mais ce moment fut interrompu par une notification sur son communicateur.

— Oui ?
— Pourquoi les civils évacuent-ils ? s'impatienta Moran. Pourquoi es-tu encore à City Z ?
— Parce que j'évacue les civils, répondit Shen Siwei calmement.
— Toi...

Moran inspira profondément.

— Tu veux dire quoi ? Tu défies les ordres de tes supérieurs ?
— Oui, dit Shen Siwei. J'aurais dû le faire la dernière fois aussi.

Les mots étaient clairs.

— Alors tu te souviens.
— Oui, répondit Shen Siwei avec un sourire moqueur. Tu n'as honte de rien.

Bien sûr, il faisait allusion au fait que Moran avait joué le rôle de son prétendu amant. Mais Klet n'étant pas au courant, le regardait avec stupeur, ne comprenant pas comment on pouvait parler ainsi à un supérieur.

— Tu ne le sais peut-être pas encore, murmura Moran en réprimant sa colère, une puce de contrôle a été implantée dans ton cerveau. Je peux t'endormir à tout moment.
— Peu importe, dit Shen Siwei avec indifférence. Je suis avec Klet en ce moment. Si tu veux ne plus jamais me revoir, tu peux essayer.

Après, il ajouta Moran à sa liste noire de communication.

— Supérieur ? demanda Klet.
— Oui, hocha Shen Siwei.
— Heh, sourit le jeune leader, une lueur traversant ses yeux. Tu me rappelles quelqu'un que j'ai connu autrefois. Lui aussi était en mission, mais il a fini par changer de camp.
— En mission ?

Shen Siwei avait saisi le point clé.

Il poursuivit :

— C'est la personne que tu cherchais dans l'armée ?
— Oui.

Klet baissa sa garde et sortit un poignard d'un étui en cuir attaché à son mollet.

— Il m'a laissé ça.

Le poignard en acier noir‑argent reflétait une lumière orangée sous le coucher du soleil.

888714

Shen Siwei resta figé, face aux chiffres familiers.

Toutes sortes de pensées se bousculèrent dans son esprit.

Pas étonnant que Klet ait les dossiers de Sara chez lui, pas étonnant qu'il dise n'avoir pas eu d'enfance, pas étonnant qu'il cherche quelqu'un aux cheveux noirs et aux yeux noirs...

Alors la personne qu'il cherchait, c'était lui ?!

— Klet, murmura-t-il, le regardant avec incrédulité, apercevant faiblement l'ombre de ce petit garçon dans ses sourcils fins et élégants.
— Qu'est-ce qui se passe ?
— Toi...

Trop d'émotions complexes affluèrent dans le cœur de Shen Siwei, et il ne savait par où commencer.

Il n'avait plus ni famille ni amis à ses côtés, et la seule personne qui lui importait était ce petit garçon dont le destin était incertain à l'époque. Et maintenant, ce petit garçon était juste devant lui, transformé en un adulte pleinement capable de se protéger.

— Pourquoi me regardes‑tu comme ça ? demanda Klet, intrigué.

Incapable de résister, Shen Siwei tendit la main et effleura doucement son visage.

Comment ce petit garçon adorable avait-il pu devenir un homme aussi colérique ?

Et le tatouage sur sa poitrine...

Shen Siwei ne put s'empêcher de rire et de pleurer à la fois.

Comment avait‑il pu se retrouver avec l'image d'un gorille ?

Klet regardait Shen Siwei, perplexe.

Se rappelant le petit qui pleurait et ne voulait pas être séparé de lui, le soldat éclata de rire, ses yeux illuminés d'une lueur douce.

— Klet, rit‑il, tu n'étais qu'un petit morveux.

L'autre fronça les sourcils, mécontent.

— Que veux‑tu dire ?
— Tu cherchais—

Avant que Shen Siwei ne puisse finir sa phrase, un « whoosh » retentit au loin. Il vit un bracelet noir filer à toute vitesse vers lui et s'attacher à son poignet, la main qui touchait Klet.

Le bracelet scintillait d'une lumière noire, signe d'un fort magnétisme. Il servait généralement à récupérer des objets extrêmement difficiles à saisir. Shen Siwei regarda rapidement d'où il venait et vit trois avions militaires arriver plus tôt que prévu. En même temps, un autre bracelet noir fonça directement vers son autre main. Il sauta rapidement du toit, l'esquivant.

— Va protéger les civils !

Après avoir atterri au sol, Shen Siwei avait initialement prévu de courir vers un bâtiment proche pour minimiser l'effet magnétique directionnel du bracelet. Mais il avait déjà commencé à agir, et une force immense le souleva dans les airs. Il dut agripper un lampadaire de l'autre main pour résister à la traction.

À ce moment précis, un événement survint, le choquant profondément.

Le bombardier n'était pas entré dans City Z ; il larguait les bombes dans la zone industrielle.

L'endroit était densément rempli de civils récemment évacués, et les bombes tombaient avec précision au milieu de la foule. Les cris montaient et retombaient, tandis qu'une épaisse fumée transformait le lieu en un véritable enfer sur terre.

Certaines personnes tentaient de se défendre, mais leurs efforts étaient vains. Shen Siwei ne pouvait apercevoir qu'un groupe de personnes portant des masques de Rossignols au loin.

Voyant quelques personnes sur le point d'être écrasées, la silhouette de Klet surgit rapidement et maintint de toutes ses forces la pierre qui tombait.

— Courez !

Les quelques civils roulèrent et rampèrent, mais d'innombrables rochers s'effondraient à nouveau. Le brun n'eut pas le temps de s'échapper et fut enseveli dessous.

— Klet !!!

Shen Siwei fixa la scène devant lui, son esprit embué par la rage qui le faisait trembler de tout son corps.

Il résista de toutes ses forces à la puissante force magnétique qui tirait sur son poignet, et ses cheveux dorés et ses yeux bleus prirent instinctivement une teinte plus sombre de carmin. Lorsqu'il accumula assez de force, il libéra le pilier de lumière dans sa main, laissant la force magnétique le propulser à grande vitesse vers l'avion. Commençant à ressentir des vertiges, il mordit sa langue pour les combattre, et la couleur de ses cheveux et de ses yeux devint encore plus foncée.

— Attendez, il n'est pas endormi !
— Suspendez la récupération, suspendez la récupération !

Il était déjà trop tard.

Shen Siwei entra dans l'avion avec le pôle magnétique et projeta les deux pilotes dans le ciel. Il s'assit sur le siège du pilote, suivit les coordonnées affichées à l'écran, et manœuvra l'appareil pour entrer en collision avec un autre avion.

Un des pilotes de l'autre appareil réagit rapidement et utilisa le siège éjectable pour s'échapper avant que les deux avions ne s'écrasent.

Mais alors qu'il respirait enfin, soulagé d'avoir sauvé sa vie, il vit une silhouette sortir des flammes et atterrir sur l'accoudoir de son siège.

— À... l'aide... murmura-t-il.

La personne devant lui, avait les cheveux rouges et des yeux terrifiants injectés de sang.

— Va en enfer, souffla-t-il en écartant les lèvres.

La seconde suivante, il fut déchiqueté.

Il ne restait qu'un pilote, mais Shen Siwei était déjà au bord de l'évanouissement. Sa bouche était emplie du goût du sang, sa langue engourdie par la morsure. Pourtant, le vertige était écrasant.

Il avait besoin d'un stimulant...

Klet...tu dois encore être en vie, n'est-ce pas...
Viens... viens m'aider...

Le bracelet noir clignota à nouveau, et le corps en chute fut soudainement aspiré vers le chasseur restant.

Moran avait effectivement tout prévu.

Pas question de dormir...
Je ne dois pas dormir...
Il y a encore quelque chose que je dois dire à Klet...

— Négociateur !

La voix résonna dans ses oreilles, et ses paupières, jusque-là fermées, s'ouvrirent à nouveau. Shen Siwei baissa les yeux, injectés de sang, et le vit debout au-dessus des décombres, l'appelant.

— Klet...

Shen Siwei n'avait plus la force de parler. Il savait aussi que Klet ne pouvait pas l'aider, la distance entre eux étant trop grande.

En une seconde, il fut aspiré dans l'avion.

Il s'accrocha jusqu'à ses limites, mais finit par fermer les yeux et sombrer.





 J'avais dit dimanche, mais ça s'est bien passé hier, j'ai juste été un peu malade donc je me suis dit que j'allais poster aujourd'hui et demain. Comme ça on finit la première partie de l'histoire ce week-end ☺️

 

 

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