Top Edge : Chapitre 48 - Mon véritable nom
— Non.
Avant même que Shen Siwei ne réfléchisse, Klet trancha à sa place.
Malken lui lança un regard incertain.
— La décision me revient, finit par dire le soldat.
— Il n’y a rien à discuter, répliqua l’autre. On trouvera une autre solution.
Le fugitif n’avait plus rien du gamin impulsif : il dégageait une autorité brute.
Shen Siwei poussa un soupir, résigné :
— Quelles sont les probabilités… de mourir ?
— Cinquante pour cent, répondit Malken.
Une chance sur deux. Pas glorieux.
Mais mieux que de rester contrôlé.
— Je veux retirer cette puce, insista-t-il. Je refuse que Moran garde la main sur ma tête.
— On peut trouver autre chose, grogna Klet. Tu réalises ce que signifie cinquante pour cent de risques ?
— Même quatre-vingt-dix pour cent, ça changerait rien. Je ne veux plus ça en moi.
Il savait que Klet s’inquiétait, mais ce choix-là, c’était le sien. Pas à quelqu’un d’autre de trancher.
— C’est bien comme c'est, répliqua Klet. Pas de traceur sur toi, Moran ignore encore où tu es.
—
Il n’a pas encore eu de soupçons, corrigea-t-il. Le jour où il
comprendra, il pourra me faire dormir d’un claquement de doigts.
— Je t’ai dit qu’on trouverait une autre solution, coupa Klet, l’impatience montant.
Cette sensation d’être dépossédé de son propre corps, c’était justement ce Shen Siwei voulait fuir.
Quelle différence entre être contrôlé par Moran et Klet décidant pour lui ?
— Peut-être… proposa Malken, je peux en reparler à ma mentor… ?
— Tant qu’il y a un risque, on ne touche pas au cerveau, trancha le fugitif.
Il tourna les talons et quitta la pièce, sans un regard.
Shen Siwei resta figé sur le canapé, l’humeur noire. Et dire qu’il le trouvait mignon quand il faisait son têtu.
— Haa… fit Malken en se grattant la tête.
Il le fixa, un brin gêné.
— Le patron ne peut plus se permettre de te perdre. Il a passé vingt ans à chercher une personne, pour apprendre qu’elle était déjà morte. Et quand il t’a trouvé, tu lui as été enlevé.
Shen Siwei resta impassible, mais sa mâchoire se relâcha.
— Il est irritable, pas patient pour un sou… Mais tendre ? Je ne l’ai vu l’être qu’avec toi, poursuivit Malken en claquant de la langue, comme décontenancé par le phénomène. Il t’aime. Tu es tout, pour lui.
Les mots résonnèrent et le capitaine repensa au carnet sur le champ de glace. À ces lignes où Klet s’avouait impuissant.
— La personne qu’il cherchait… c’était quelqu’un qu’il aimait ? demanda-t-il, un peu mal à l’aise. Il était jeune, non ?
—
Oh non, non ! s’empressa de nier Malken. Plutôt une idole. Quelqu’un
qui lui avait sauvé la vie. Il a basé ses préférences sur lui après ça,
mais tu as brisé cet idéal. Donc… tu comptes encore plus.
Ou peut-être juste que l’autre n’était plus là pour rivaliser.
Cette pensée fit honte à Shen Siwei : il stoppa net la comparaison et se leva.
— Compris, dit-il simplement.
En sortant, il retrouva Klet, en train de fumer devant le salon. Il lui prit la cigarette, l’écrasa.
— Emmène-moi quelque part.
Klet arqua un sourcil.
— Où ça ?
— Là où tu m’as vu pour la dernière fois. Il y a cinq ans.
Un soupir. Puis :
— D’accord.
Le soleil déclinait, teintant les ruines d’orangé. Au sommet d’un immeuble éventré, un carré de béton avait été nettoyé.
— Tu viens souvent ici ? demanda Shen Siwei en s’asseyant.
— Parfois. Tu te souviens de l’endroit ?
Il secoua la tête.
Le silence les enveloppa, lourd de mille inquiétudes qu’aucun ne voulait prononcer.
Alors il prit l’initiative :
— Tu m’avais demandé ce que je voudrais faire une fois libéré de Moran.
Klet tourna vers lui un regard attentif.
— Je voudrais… faire un tour de grande roue avec toi, avoua Shen Siwei.
Surpris, l’autre écarquilla les yeux, puis fronça les sourcils :
— Mais je ne veux pas te perdre.
— Je sais.
Shen Siwei comprenait enfin : ici, choisir seul, ce n’était plus de l’autonomie. C’était ignorer celui qui comptait.
Ça n'avait rien à voir avec le contrôle de Moran.
Si l’opération échouait, Klet se rongerait de culpabilité jusqu’à la fin. Il refusait de laisser ce poids-là.
Non, il ne pouvait plus n’être que soldat. Il avait quelqu’un.
Quelqu’un qui comptait.
Klet.
Celui-ci se racla finalement la gorge :
— À propos de l’opération…
— On a encore un peu de temps, coupa Shen Siwei. On réfléchit encore.
Klet se déplaça, vint derrière lui, s’assit et l’enlaça, jambes de part et d’autre.
— Tu me trouves toujours immature ? murmura-t-il à l’oreille.
Il leva le visage :
— Ça changerait quoi ?
— Hmm ?
— Que tu sois mature ou pas… je veux quand même faire ce tour de grande roue avec toi.
Klet eut un bref rire étouffé, resserra son étreinte.
Le torse ferme derrière lui était incroyablement confortable.
— Le soleil se couche, remarqua-t-il.
Les lampadaires s’allumaient, la vie reprenait dans les rues.
Eux deux restaient isolés, hors du monde.
— On rentre ? proposa Klet.
Shen Siwei ôta son masque. Pas besoin d’explication.
Le baiser fut naturel. Chaleureux. Lent. Puis le feu remplaça la douceur, et l’air devint précieux.
— Mmh… Klet… articula-t-il, soudain conscient qu'à l’avenir, chaque baiser serait un risque.
Le communicateur sonna. Une bénédiction.
Klet décrocha, exaspéré :
— Quoi ?
— Mon mentor propose un autre plan, annonça Maiken. Bloquer le signal. Dix pour cent de chance, de ne jamais se réveiller.
Encore trop, à voir la tête de Klet.
— On peut tenter, dit Shen Siwei. Qu’en dis-tu ?
Le silence fut si long qu'il cru que ce plan là aussi allait être balayé.
— Faisons-le, lâcha finalement Klet.
— Sûr ?
— Tu as fait un compromis. À moi maintenant.
Mais malgré ses mots, il le serrait comme s’il allait s’évaporer s’il le lâchait.
Shen Siwei pinça sa joue, amusé :
— Toujours mignon, finalement.
— On… reprend ? demanda Klet, un œil sur ses lèvres.
Le soldat leva le menton et remit son masque juste avant le contact. Puis sauta du toit.
— Préparons l’opération.
⸺
Le Vieux Fantôme était trop âgée pour pratiquer. Maiken s’en chargerait, avec des dizaines de caméras pour le guidage en direct.
— Klet, gronda la vieille holographique, tu me devras trois ans d’eau potable si ça marche.
— On verra après, répondit-il sèchement.
Allongé, Shen Siwei écoutait distraitement.
— Comment te sens‑tu ? demanda lentement Malken en injectant l'anesthésie dans son cuir chevelu.
— Bien.
Ils anesthésièrent d'abord la zone du cuir chevelu pour éviter que la peau ne bouge quand la générale ferait effet, ce qui rendrait l'opération impossible.
Au bout d'un moment, Malken pressa la zone endormie et demanda :
— Tu sens quelque chose ?
— Non.
— Parfait… Le moment critique commence.
Il plaça le masque sur sa bouche et son nez, puis se tourna vers l'image projetée de sa mentor :
— Surveille-moi. C'est la première fois que j'effectue une opération aussi importante. Si elle réussit, je devrai changer mon titre de « Main magique » à « Maître magique ». Quant à mes honoraires...
Klet, debout sur le côté, l'interrompit impatiemment :
— Arrête le blabla.
Il toussota en réponse, puis leva le scalpel et prit une profonde inspiration.
— Je suis nerveux. Si je fais la moindre erreur, je t'en prie, ne m'en veux pas. Le risque est déjà très élevé.
Klet fronça les sourcils, laissant clairement transparaître son envie de frapper quelqu'un.
— D'accord, je me tais, murmura Malken.
L'oxygène fut remplacé par le gaz anesthésiant, et Shen Siwei sentit rapidement sa conscience se brouiller.
Une grande inquiétude s'empara alors de lui.
Et si l'opération échouait ? Si c'était la dernière fois qu'il voyait Klet ?
Avec cette pensée, il résista à la somnolence et appela d'une voix basse :
— Klet…
— Oui ? dit celui-ci aussitôt, alarmé.
— J’ai oublié de te dire un truc… Mon nom… Mon véritable nom est Shen Siwei…
Il ferma les yeux, soulagé.
Et ne vit pas Klet devenir fou furieux, saisir Maiken par le col et hurler d’arrêter tout.
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Ooooh sayé le vrai nom a été dévoilé..aaah trop dur d'attendre la suite
RépondreSupprimerOn a attendu si longtemps ! On peut fêter ça ! 😍
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